III L'ANGE ET LA MÈRE
Que la paix du Seigneur repose. Sur cette mère et son trésor,
Et que sur leur paupière close, elle verse des songes d'or !
Enfant, dormez, pour vous je prie, et dois veiller avec amour,
Afin qu'au terme de la vie, vous bénissiez ce premier jour.
Hélas ! Combien de fois l'aurore qui brille à l'orient vermeil,
Doit-elle se lever encore, avant votre dernier réveil!
Combien de fois les taches sombres, qui naissent d'un limon impur,
Terniront-elles de leurs ombres ce lac aujourd'hui tout azur.
Loin des sentiers de la patrie, l'homme, voyageur égaré,
Cherche en vain la source infinie dont il fut ailleurs enivré.
Oubliant la patrie absente, suit le nuage trompeur
Où sous une forme enivrante, voit le rêve de son cœur.
Mais bientôt l'idéale image, du ciel imparfait souvenir,
S'évanouit comme un nuage, dans la main qui croit le saisir.
L'âme d'un trait mortel blessée, ne peut plus reprendre son vol.
Pauvre oiseau, qui, l'aile cassée, se traîne sanglant sur le sol.
Vous seul savez, mon Dieu, quels dangers, que d'alarmes
Menacent votre enfant et, si j'ose trembler,
Pardonnez-moi, vous seul pouvez compter les larmes
Qui de ses yeux doivent couler.
Pitié pour lui, Seigneur, et pour ce cœur de mère
Plein d'un amour si saint, et si fort et si doux !
Cet amour n'est-il pas lui-même une prière,
La plus éloquente pour vous?
Mais votre juste main a pesé la mesure
Des douleurs qu'ici-bas tout homme doit porter ;
Pour accomplir la loi de sa noble nature,
Il faut souffrir pour mériter.
Des ombres du présent tout l'avenir s'éclaire,
Ce n'est point un vrai mal, le mal qui peut finir
Car vous êtes. Seigneur, bien moins juge que père ;
Si vous frappez c'est pour bénir ;
Pour que l'homme vous cherche, en vous seul qu'il espère,
Et, qu'aimant et soumis, il vous rende son cœur,
Trop longtemps égaré, sur cette triste terre,
A la poursuite du bonheur.